Lutter contre les maladies du feuillage en betterave sucrière

Cercosporiose, oïdium, rouille : ces maladies du feuillage attaquent les betteraves sucrières en période estivale et peuvent être très impactantes elles. Nuisibilité, symptômes, méthodes de lutte, voici tout ce que vous devez savoir pour protéger vos betteraves sucrières et réagir au mieux pour enrayer la propagation de ces maladies fongiques.

Comment réduire la pression fongique sur les betteraves sucrières ?

Afin d’éviter un développement trop important des champignons sur les betteraves sucrières, plusieurs mesures préventives sont à mettre en place. Des rotations allongées (3 à 4 ans minimum) permettent notamment limiter les maladies. Le labour après l’infection des cultures peut aussi être utile, car il stimule un développement plus précoce du champignon qui, sans plante hôte, ne survivra pas. Une bonne gestion des résidus de récolte et des silos, qui agissent comme des réservoirs pour ces champignons, est à mettre en place.

Des apports équilibrés de tous les nutriments et une surveillance accrue permettront de maintenir des betteraves en meilleure santé, moins sensibles aux maladies du feuillage. En cas d’irrigation de la culture, réguler l’apport en eau permettra d’éviter un excès d’humidité, environnement favorable au développement des maladies fongiques.

Bien évidemment, nous vous conseillons de choisir des variétés avec un bon niveau de tolérance, comme FD Médaille pour la cercosporiose. Cela permet de minimiser l’accumulation des spores dans le sol.

En cas d’infection, et ce dès les premiers symptômes, le fongicide devra être appliqué au plus tard au seuil de traitement, selon les recommandations de l’ITB ou des services agronomiques des sucreries, pour enrayer le développement de la maladie. L’utilisation de matières actives avec différents modes d’actions est fortement conseillée, pour éviter l’apparition de souches résistantes.

Focus sur les 3 principales maladies du feuillage : la cercosporiose, l’oïdium et la rouille          

La cercosporiose

Points clés

La cercosporiose est, après la jaunisse, la maladie la plus préjudiciable pour la betterave sucrière en France, avec des pertes de rendement pouvant aller jusqu’à 30% si elle n’est pas contrôlée. Elle touche la plupart des régions betteravières, et principalement l’Alsace, l’Île-de-France, le Centre-Val de Loire et la Champagne. Cette maladie causée par Cercospora beticola apparaît tôt dans la saison, généralement à partir du mois de juillet et se développe très rapidement. Pour limiter l’impact de la cercosporiose, il faut privilégier des variétés avec un bon niveau de tolérance et utiliser les fongicides adaptés.

Cycle d’infection

Le cycle d’infection d’une betterave sucrière par la cercosporiose débute lorsqu’une spore de dissémination (conidie) tombe sur une feuille de betterave. Quand les conditions sont favorables, la spore germe et infecte la feuille par ses stomates. Le champignon se développe ensuite sous forme d’un mycélium dans l’espace intercellulaire de la feuille. C’est ce mycélium qui produit des toxines néfastes pour la plante, responsable des nécroses et de la sénescence du feuillage.

Dans des conditions climatiques favorables, le champignon sporule et forme des conidiophores dans les cavités substomatales. Des conidies sont libérées à la surface de la feuille, pour ensuite se disperser sur une nouvelle feuille ou plante, portées par le vent et la pluie. Un nouveau cycle d’infection peut donc recommencer. Le cycle entier s’effectue très rapidement et peut se répéter plusieurs fois sur une période de croissance, surtout en cas d’attaques précoces.

Si les conditions sont défavorables, le champignon survit dans les débris des plantes infectées : 2 à 3 mois au stade conidial, jusqu’à 3 ans via ses conidiophores.

Ces grandes étapes (disséminations des spores, prolifération du mycélium et formation de la structure de survie) sont les mêmes pour toutes les maladies du feuillage.

Symptômes

Cette maladie se caractérise par des petites tâches rondes et grises, avec une bordure brunâtre et des points noirs au centre (mycélium gris). L’infection commence à l’extérieur de la feuille et se propage vers l’intérieur, en touchant d’abord les feuilles les plus anciennes. Quand les lésions se multiplient et s’agrandissent, les feuilles se dessèchent et meurent. La plante réagit alors en produisant un nouveau bouquet foliaire, ce qui diminue son rendement et sa teneur en sucre.

Facteurs de développement

Les températures chaudes (27-32°C) et une forte humidité (à partir de 60% d’hygrométrie) augmentent le risque d’infection par la cercosporiose, tout comme la pluie, le vent et les insectes qui favorisent la propagation de la maladie. De plus, il ne faut pas laisser les résidus de feuilles sur la parcelle après déterrage pour prévenir l’infection. Une rotation culturale courte est également un facteur de risque, comme le non-labour.

Prévention

Une rotation de culture d’au moins trois ans limitera les risques de cercosporiose. Le choix d’une variété avec un bon niveau de tolérance comme FD Pulse ou FD Médaille permettra de ralentir l’évolution de la maladie tout en conservant le potentiel de rendement. Une application de fongicides conformément aux seuils de traitement et aux recommandations de l’ITB et des services agronomiques des sucreries est également à mettre en place.

L’oïdium

Points clés

Le champignon Erysiphe betae se développe dans toutes les régions, grâce à une forte chaleur et une sécheresse, avec un impact important sur le rendement et la teneur en sucre. Dans les cas les plus graves, les pertes de rendement peuvent aller jusqu’à 30%.

Symptômes

 L’oïdium se caractérise par des duvets gris et blancs qui se forment au-dessus des feuilles, sur les feuilles situées au centre et sur l’extérieur de la betterave sucrière. Cette maladie peut même former une couche grisâtre ou poudreuse sur la feuille dans les cas les plus graves. Les feuilles passent du vert clair au jaune avant de mourir.

Facteurs de développement

L’alternance des conditions sèches et humides, avec un écart important de température, comme entre la journée et la nuit, avec la rosée du matin, accélèrent son développement. Le vent et la pluie favorisent la propagation de la maladie.

Prévention

Pour éviter au maximum les risques d’oïdium, mieux vaut choisir des variétés avec un bon niveau de tolérance comme FD Crawl et FD Winning. Il faut également vérifier régulièrement vos parcelles et appliquer des fongicides conformément aux seuils de traitement et aux recommandations de l’ITB ou des services agronomiques des sucreries.

La rouille

Points clés

La rouille sur betteraves sucrières, provoquée par le champignon Uromyces betae, touche toutes les régions betteravières. Cependant, les pertes financières sont en général limitées car les feuilles sont touchées tardivement en végétation, avec un faible impact sur le rendement.

Source photo : Agriculture de demain

Symptômes

La rouille se caractérise par des cercles concentriques jaunes qui se développent autour de pustules brun/rouille, sur les feuilles centrales et extérieures. Leur multiplication peut recouvrir le feuillage et entrainer un dessèchement des feuilles.

Source photo : ITB

Facteurs de développement

Ce champignon prolifère dans un environnement très humide, avec des températures comprises entre 15 et 22°C. Un excès d’azote ou un arrachage tardif favorisent également le développement de la maladie, propagée par la pluie et le vent.

Prévention

En cas d’infestation, une application fongicide permet de contrôler la rouille.

Et la sélection dans tout ça ?

La résistance aux maladies du feuillage est contrôlée par plusieurs gènes. Plus le nombre de ces gènes dans l’hybride est important, plus la tolérance est forte. On peut avoir un seul gène de résistance mais cela expose à des risques : en cas de contournement du gène par la maladie, la variété sera complétement sensible. Mieux vaut cumuler les résistances pour que cela soit plus durable.

Dans le cadre de nos croisements, nous introduisons des gènes de résistance aux maladies du feuillage à l’aide de backcross successifs entre une lignée élite et une lignée sauvage. Nous sélectionnons les plantes qui ont le plus de caractéristiques du parent élite tout en étant à la fois résistantes. Cette sélection s’effectue grâce à des essais à la fois au champ et en serre, en contaminant les parcelles. Si la résistance aux maladies est un critère clé, le rendement et plus particulièrement la teneur en sucre sont toujours les premiers critères pris en compte.

Grâce aux techniques de pointes employées par nos chercheurs, des ensembles de gènes codant pour un caractère appelés QTL (Quantitative Trait Loci) ont été identifiés grâce à des populations de cartographie : on croise un parent sensible à une maladie avec un parent résistant, et on étudie leur descendance grâce à du marquage moléculaire pour identifier des QTL de résistance à la maladie. D’autres QTL ont été identifiés dans du matériel exotique, dans le cadre du programme AKER. 4 variétés ont été reconnues pour leur très grande résistance à la cercosporiose et à l’oïdium, et présentent donc un grand intérêt pour nos croisements.