Les néonicotinoïdes, sont « des substances insecticides dites systémiques utilisées en agriculture pour protéger les cultures de ravageurs », explique l’ANSES (Agence nationale de la sécurité sanitaire). Les néonicotinoïdes ont été interdits en 2018 car ils ont été réputés « tueurs d’abeilles ».
La loi du 14 décembre 2020 a autorisé par dérogation temporaire l’utilisation des néonicotinoïdes pour la culture des betteraves sucrières, particulièrement menacée par les pucerons.
Trois raisons expliquent cette dérogation :
De plus, l’interdiction des néonicotinoïdes a provoqué une invasion de pucerons porteurs de la jaunisse, ce qui a fortement menacé la culture de la betterave sucrière en France. Les rendements ont chuté d’environ 30% avec des baisses allant jusqu’à 50% en 2020.
Ce sont toutes ces raisons qui ont poussé le gouvernement à prolonger l’utilisation des néonicotinoïdes par dérogation pour la culture de la betterave sucrière.
Les néonicotinoïdes sont présents directement dans l’enrobage des graines et sont assimilés par celles-ci. Quand la betterave se développe, les néonicotinoïdes circulent dans la plante, ce qui la protège jusqu’à la dégradation de l’insecticide. Sans cette protection, la betterave est vulnérable à la jaunisse.
Il faut également savoir qu’il n’y a pas un mais quatre virus de la jaunisse de la betterave, présents seuls ou en co-infection. C’est ce qui rend la lutte contre la jaunisse aussi complexe.
Les quatre virus sont :
C’est le puceron vert qui est le principal vecteur des jaunisses, et, dans une moindre mesure, le puceron noir. Il suffit qu’un puceron soit porteur de la jaunisse et qu’il pique une feuille de betterave saine pour que toute la plante soit contaminée. Sachant qu’un seul puceron peut donner naissance à 4 pucerons chaque jour, la propagation est extrêmement rapide. Comme l’explique l’ITB, « un seul puceron virulifère peut à terme, directement et via sa descendance, contaminer 600 betteraves ».
Sans néonicotinoïdes pour freiner cette prolifération, la maladie se propage très rapidement.
Une feuille de betterave infectée par la jaunisse va, selon le virus, soit prendre une teinte jaune-orangée, soit prendre une teinte jaune citron, devenir rougeâtre ou ses nervures vont blanchir, par exemple. Les symptômes ne sont pas toujours identiques, mais la finalité est la même : la photosynthèse est ralentie, ce qui entraîne des pertes de rendement sur les betteraves qui peuvent atteindre jusqu’à 50%.
Ces pertes mettent en danger toute la filière betterave sucrière, et sans néonicotinoïdes, il faut trouver une solution alternative efficace pour la préserver.
Plusieurs solutions existent en alternative aux néonicotinoïdes : des leviers phytosanitaires, des leviers agronomiques et des leviers génétiques. C’est en alliant ces trois solutions que nous réussirons à combattre le virus.
Le levier génétique et la sélection variétale sont des solutions très prometteuses : c’est en créant des variétés résistantes ou tolérantes aux pucerons et aux virus de la jaunisse que la filière betterave sucrière pourra se passer des néonicotinoïdes sans être mise à mal.
Le laboratoire SmartPath de Florimond Desprez étudie les pucerons, les virus de la jaunisse et les symptômes de la maladie pour mieux comprendre les mécanismes d’infection et de résistance. Il se charge également de produire des pucerons porteurs des virus de la jaunisse pour inoculer des parcelles de betteraves sucrières et effectuer des tests.
En parallèle, nos sélectionneurs cherchent à identifier des gènes de résistance dans le matériel à disposition : les variétés élites et les variétés exotiques issues du programme AKER.
Nos sélectionneurs ont pu constater une forte variabilité génétique dans le matériel évalué. Cela confirme que la sélection variétale est une solution à la problématique jaunisse en betterave sucrière.
Chez Florimond Desprez, nos travaux se divisent en deux axes principaux :
Lorsqu’un croisement nous semble prometteur, nous l’évaluons en l’inoculant avec la jaunisse, en champ ou en serre.
Sans néonicotinoïdes, dans l’immédiat, il y a peu de solutions efficaces à apporter pour freiner l’impact de la jaunisse sur la betterave sucrière.
Cependant, les résultats obtenus grâce à la sélection variétale sont prometteurs.
Chez Florimond Desprez, dans notre matériel élite, nous avons identifié de très bonnes variétés pour lesquelles les pertes de rendement sont limitées à seulement 10% en conditions jaunisse, contre 50% pour les variétés les plus sensibles. Celles-ci seront déposées au CTPS dès janvier prochain.
Concernant notre matériel exotique, nous avons constaté que certaines lignées issues du programme AKER présentent un très bon comportement avec des symptômes limités en conditions jaunisse. Nous allons continuer les croisements pour proposer le plus rapidement possible des variétés tolérantes ou résistantes à la maladie.
Sans néonicotinoïdes, la betterave sucrière a un avenir, mais il faudra encore du temps pour y arriver. Les équipes Florimond Desprez sont mobilisée et ont fait de la jaunisse de la betterave leur priorité. Toute la filière betterave est également mobilisée, avec notamment 5 semenciers, dont Florimond Desprez, qui se sont unis pour lutter contre la jaunisse de la betterave sucrière dans le cadre du projet FLAVIE.